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dimanche 16 février 2014

Petit historique des registres paroissiaux en Belgique.

Naissance, mariage et décès sont des événements importants pour l'individu, sa famille et la société elle-même.  La rédaction de ces étapes de la vie des gens est d'une importance cruciale.
 
(Archives de la ville de Bruxelles)

Il y a deux mille ans que l'initiative d'inscrire les naissances, les mariages, les divorces et les décès des citoyens romains a été prise dans l'Etat romain.  L'empereur Marc Aurèle décréta que les enfants devaient être inscrits dans les trente jours après leur naissance.  Les registres étaient conservés au temple.  Cette initiative aurait pu être à l'origine d'un registre mondial avec une inscription uniforme de tous les citoyens.  Suite à la chute de l'empire romain, l'administration centrale disparut en même temps que l'enregistrement des naissances, des mariages et des décès.
 
A la fin du XIIIe siècle les premiers registres paroissiaux apparaissent.  Les curés notaient les noms de ceux qu'ils ont mariés et de ceux qu'ils ont enterrés.  L'inscription se faisant de leur propre initiative et sans directives précises.  Par conséquent, les notations sont très fragmentées.  En 1497, lors du synode d'Alcala, le cardinal-archevêque de Tolède, Franciscus Ximenes de Cisneros, établissait les premières règles pour l'inscription des actes de mariages.
 
Lors du Concile de Trente (1545-1563) on voit apparaître des directives claires concernant la rédaction des actes de baptême et de mariage pour l'ensemble de l'église catholique romaine.  La décision concernant les actes de baptême est prise le 11 novembre 1563.  Ils étaient utilisés surtout pour vérifier les liens de parenté des mariés lors du mariage.  Les actes de baptême contenaient le nom de l'enfant, de ses parents et du parrain et de la marraine.  Une décision semblable a été prise pour la rédaction des actes de mariage.  Cependant l'enregistrement des enterrements et des décès n'était pas mentionné.
 
Au XVIe siècle l'autorité civile prenait les premières initiatives pour l'enregistrement des étapes les plus importantes de la vie des ses citoyens.  Le roi de France François Ier ordonna en 1539 l'édit de Villers-Cotterêts.  Il donna l'ordre de tenir des registres de naissances et de décès.
 
Une importance spécifique était accordée à la rédaction des actes des personnes possédant un bénéfice ecclésiastique.  L'ordonnance n'était pas suivie de manière consciencieuse par tous les prêtres.  En 1579, le roi Henri III a édité l'ordonnance de Blois.  Les directives de Villers-Cotterêts ont été rappelées et une obligation supplémentaire concernant l'enregistrement des mariages fut ajoutée.  L'attention est attirée sur l'importance d'un enregistrement correct et d'une bonne conservation afin de pouvoir utiliser les documents comme preuves lors d'un procès.
 
Suivant le modèle français, d'autre autorités civiles ont réglementé l'inscription des naissances, des mariages et des décès.  Ils étaient de plus en plus convaincus de l'importance d'une bonne connaissance de la composition de la population et des relations familiales.
 
Dans les Pays-Bas méridionaux, les archiducs Albert et Isabelle ont publié le 12 juillet 1611 l'Edit perpétuel.  L'article XX contenait l'obligation de faire des doubles des registres paroissiaux chaque année.  Le registre devait être conservé au greffe de l'échevinage.  Les magistrats étaient chargés du contrôle de la bonne exécution du règlement.  Dans la pratique, la directive n'était pas suivie de manière stricte.  Le gouverneur Charles de Lorraine rappela cet article en 1752.
 
Deux ans après, le 6 mars 1754, Marie Thérèse publia une ordonnance dans laquelle les prêtres étaient tenus de faire des doubles authentiques des registres paroissiaux et de les transmettre aux échevins dans les six semaines après la fin de l'année.  L'amende pour non-conformité a vraisemblablement incité les prêtres à respecter la directive.  Le 6 août 1778 un nouveau décret imposa les conditions formelles de l'acte et de son contenu.  Les actes devaient se suivre chronologiquement sans discontinuité.  L'enregistrement d'un baptême et d'un mariage devait se faire immédiatement après la cérémonie ; un décès devait être inscrit dans les 24 heures.  Les noms devaient être inscrits de manière intégrale sans abréviations.  Le curé et les témoins signaient l'acte.  Les doubles des actes étaient alors envoyés aux Etats provinciaux.
 
La Révolution française changea tout !
 
Après la séparation de l'Eglise et de l'Etat, l'état civil a été instauré.  La loi du 20 septembre 1792 ordonna aux fonctionnaires d'inscrire les naissances, les mariages et les décès.  Après l'incorporation des Pays-Bas méridionnaux par la France, l'état civil est instauré par le décret du Directoire du 17 juin 1796 (29 prairial an IV).  Il prévoyait trois registres : un pour chaque type d'acte.  Un double était à envoyer au conseil du district.  Pour en garantir la continuité, l'autorité civile obligea les prêtres à transférer les registres paroissiaux afin qu'ils puissent être utilisés comme pré-état civil.

La fin du XVIIIe siècle et les premières années du XIXe siècle est une période de transition.  Les curés continuaient à inscrire les actes.  Une comparaison entre les actes dans les registres paroissiaux et les actes de l'état civil montre parfois des divergences.  Certains fonctionnaires utilisaient d'anciens registres paroissiaux pour noter les actes civils.

Dans l'arrêté du 17 octobre 1800 (25 vendémiaire an IX) les tables décennales ont été introduites.  Ces listes devaient faciliter la recherche dans les registres.  Le décret du 20 juillet 1807 ajoutait l'obligation de faire les tables en double exemplaire : un exemplaire à conserver à la commune et un deuxième exemplaire à envoyer au greffe du tribunal de première instance.

Les actes de naissance, de mariage et de décès étaient souvent rédigés en latin.  L'utilisation de la langue populaire n'était pas courante.  Le curé se servait souvent de formules stéréotypées pour la rédaction des données.  Suivant la période mais aussi de région en région ou même suivant le curé, il existe de grandes variantes au niveau de l'information.  Le curé profitait d'une liberté et les recommandations étaient minimales.

En ce qui concerne les actes de naissances les synodes provinciaux de l'évêché de Cambrai à Mons en 1586 et à Malines en 1607 ont recommandé de reprendre dans l'acte le nom et les prénoms de l'enfant et aussi de ses parents, du parrain et de la marraine ainsi que la date complète de la cérémonie.  En 1644 l'évêque de Bruges, Nicolas de Haudion ajouta l'obligation de noter la date de naissance à côté de la date du baptême.  L'Edit du 6 août 1778 reprit les règles de l'Eglise ; l'acte de baptême devait reprendre le jour et l'heure de la naissance, ainsi que les noms et prénoms de l'enfant, de ses parents, parrain et marraine et la date de la cérémonie.

Le nom du père d'un enfant illégitime ne pouvait pas être repris dans l'acte sauf s'il était présent lors du baptême et acceptait de signer l'acte.  Les actes de baptêmes mentionnent explicitement s'il s'agit d'un enfant légitime (légitimus) ou illegitime (illegitimus).  Pour les enfants abandonnés, le lieu et la date de leur découverte sont notés.

Le contenu d'un acte de mariage est étroitement lié à l'obligation religieuse du mariage.  Le concile de Latran en 1215 a introduit l'obligation de publier à l'église les trois bans ou le mariage est annoncé pendant trois dimanches ou jours fériés consécutifs.  Pour des raisons exceptionnelles, une dispense pouvait être accordée.  Les bans sont mentionnés dans l'acte (proclamatis tribus bannis).  Le mariage était célébré dans la paroisse d'un des époux, généralement celle de la mariée.  Lors de chaque mariage au moins deux témoins devaient être présents qui signaient aussi l'acte.  Dans l'acte on retrouve les noms des époux, de leurs parents, des témoins mais souvent aussi leur âge, leur origine et même leur profession.  Parfois le curé inscrivait aussi les détails des dispenses pour consanguinité, des données concernant leur incapacité juridique et à propos du contrat de mariage.

La notification des décès et des enterrements n'était pas obligatoire selon les règles du Concile de Trente.  Dans la pratique, elles étaient parfois reprises dans les comptes des églises, souvent sans date.  L'Edit perpétuel de 1611 contient l'obligation de noter les décès.  L'évêque de Bruges, Nicolas de Haudion, prescrit en 1644 de noter aussi les décès des enfants.  Les édits de 1754 et1778 reprennent les mentions obligatoires : date et heure du décès, nom, prénoms et profession de la personne décédée.  Le curé notait les enterrements.  Par conséquent tous ceux qui n'ont pas bénéficié d'un enterrement catholique (par exemple les hérétiques et les suicidés), ne sont pas repris dans les registres.

Beaucoup d'actes reprennent plus d'information que nécessaire.  Les curés notaient parfois la cause du décès et des données concernant le lieu de l'enterrement.

Les exigences minimales pour les actes ont été introduites progressivement.  Pendant une longue période le curé a disposé d'une grande liberté concernant la rédaction des données dans les registres paroissiaux.

Vu qu'il n'y avait pas encore d'orthographe stricte des noms, il notait les noms phonétiquement.  Le même nom de famille pouvait avoir différentes orthographes.  Les prénoms étaient systématiquement latinisés.

Quelques prêtres ont utilisé leur registre pour faire des annotations sur différentes choses.  Ces petites notices contiennent des données uniques sur la vie quotidienne d'un village ou donne le point de vue du curé sur les événements importants.

Dans les prochains articles, vous pourrez lire un florilège des registres paroissiaux.

Source : Un florilège des registres paroissiaux (Baptiste F., Coenen A., Verachten L., Archives Générales du Royaume, 2011)


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